75 ans après sa création, l’Organisation Nations Unies (ONU) mérite d’être réformer démocratiquement. L’organisation a été construite à l’aune de la Seconde Guerre mondiale par un monde détruit et tout le système a été façonné dans l’objectif de maintenir les canaux de discussions ouverts entre les nations pour éviter un conflit. Toutefois, le monde dans lequel nous vivons est bien différent de celui des années 1940.

Les défis auxquels nous sommes confrontés sont à la fois transversaux, et vont au-delà des frontières nationales. Le dérèglement climatique ne connaît pas de politique à somme nulle, les différends concernent de plus en plus des acteurs non-étatiques, et nos systèmes financiers sont imbriqués au point que des prêts à risque aux Etats-Unis peuvent provoquer un chômage de masse en Europe. La nécessité d’une coopération internationale pour répondre à de tels enjeux n’a jamais été aussi forte, mais nos infrastructures démocratiques sont résolument dépassées.

Aux côtés d’une coalition de plus de 150 ONG, Democracy International appelle à trois réformes démocratiques du système onusien. Nous avons lancé un appel mondial dans le cadre de la campagne We The Peoples pour introduire une Initiative Citoyenne Mondiale de l’ONU, un mécanisme qui permettrait aux citoyen.ne.s d’inscrire des sujets à l’ordre du jour des Nations Unies ; une Assemblée Parlementaire des Nations Unies, de sorte que les citoyen.ne.s auront leur mot a dire sur qui les représente aux Nations Unions ; et la création d’un Bureau onusien des envoyés de la société civile, qui renforcerait la participation des ONG au sein des Nations Unies. De nombreuses organisations dans le monde entier, dont Avaaz, Greenpeace, ActionAid et Open Society Foundations se sont jointes à cet appel, qui peut encore être soutenu ici.

Nous ne sommes pas les seuls à soutenir qu’il est urgent de réformer les Nations Unions. L’année dernière, à l’occasion du 75^ème anniversaire de l’ONU, le Secrétaire Général Antonio Guterres a organisé des cycles de discussions pendant un an, regroupant un total de plus de 1,5 million de citoyen.ne.s venu.e.s de plus de 195 pays. L’objectif était de découvrir comment les individus perçoivent les Nations Unies dans le monde et quel rôle l’organisation devrait jouer à l’avenir. Un pourcentage impressionnant de 97% des participants, a répondu que le travail de l’ONU était important et nécessaire, mais 40% a aussi reproché un fonctionnement trop distant de leur quotidien. Deux solutions ont été retenues et ont été incluses dans le rapport final des Nations Unies, il s’agit de l’introduction d’une Initiative Citoyenne Mondiale de l’ONU et d’une Assemblée Parlementaire de l’ONU.

Les résultats de ces consultations ont été un signal d’alerte pour les Etats membres de l’ONU qui ont décidé d’enclencher un véritable processus de réforme. A l’Assemblée Générale des Nations Unies de septembre 2020, le Secrétaire Général Guterres a été missionné pour rédiger une fiche de route sur le futur de l’ONU, un des éléments principaux qu’il devrait étudier est de quelle manière l’ONU pourrait se réformer elle-même. Afin de collecter les idées des citoyen.ne.s et de la société civile, il a créé une plateforme de consultation en ligne où les individus peuvent proposer des solutions et voter pour celles des autres. Nos trois propositions font partie de celles qui ont reçues le plus de votes sur la plateforme !

Le 7 juin, l’Assemblée Générale des Nations Unies élira un président pour sa 76^ème session. Une lueur d’espoir : ils ont organisé un débat public avec les deux candidats et ont demandé à la société civile d’envoyer des questions à leur poser. Nos questions concernaient la position du nouveau Président de l’Assemblée Générale sur les innovations démocratiques au sein des Nations Unies, telles que l’Initiative Citoyenne Mondiale des Nations Unies. Elles ont été retenues et posées à l’honorable Abduallah Shahid, l’actuel ministre des Affaires étrangères aux Maldives. Il a répondu que « l’important pour nous aujourd’hui, est que nous soyons connectés avec le peuple. […] Que nos électeurs, nos contribuables disent : oui, voici une organisation qui nous répond, voici une organisation qui nous défend et voici une organisation qui œuvre pour nous. Nous devons leur apporter cet espoir et cette assurance. C’est l’esprit de la Charte des Nations Unies, c’est l’esprit de la déclaration du 75^ème anniversaire et nous devons assurer que nous nous y tiendrons ».

Tous ces développements montrent qu’au sein du système onusien et auprès des Etats membres il y a une prise de conscience, l’ONU doit entrer dans le XXI^ème siècle. Il y a aujourd’hui une impulsion sans précédent pour construire une Organisation des Nations Unies plus inclusive et démocratique. L’important est maintenant de continuer ainsi. Au cours des prochaines semaines, nous contacterons les ministères des Affaires étrangères de 83 Etats membres démocratiques, pour leur demander de soutenir nos propositions pour une réforme des Nations Unies, puisque ce sont eux qui finalement voteront sur ces propositions pour rendre l’ONU réellement participative.

Nous avons des outils technologiques incroyables aujourd’hui qui permettent une participation véritablement mondiale, alors pourquoi ne pas s’en servir afin d’accorder aux individus du monde entier une place dans le processus décisionnel mondial ? Nous n’utilisons pas la technologie des années 1940 dans aucun autre domaine de notre quotidien. Il n’y a donc aucune raison de recourir à la gouvernance mondiale des années 1940 pour faire face aux enjeux actuels les plus importants.

Source photo: Les programmatrices Marlyn Wescoff et Ruth Lichterman en train de brancher l’ordinateur, à la pointe de la technologie, ENIAC dans les années 1940 – Photo de l’armée américaine – Public Domain