La Conférence sur l’avenir de l’Europe était attendue depuis bien longtemps, avant même qu’il lui soit donné un nom officiel. Les organisations de la société civile, les militants pour la démocratie, et des hommes/femmes politiques ont réclamé une opportunité pour les citoyen.ne.s de se réunir pour échanger sérieusement sur l’Europe et sur quelles devraient être ses priorités. Enfin, après le taux record de participation aux dernières élections européennes de 2019, les premières élections depuis le Brexit, il est devenu évident pour les personnes à la tête de l’Union européenne (UE) qu’un véritable dialogue avec les citoyen.ne.s devait se tenir – et pas seulement de manière symbolique.
Mais comment atteindre et entendre les voix de l’européen.e lambda avec presque 500 million de citoyen.ne.s ? Les Institutions européennes se sont inspirées des exemples de participation dans les Etats membres, tels qu’en Irlande, en France et en Allemagne qui ont fait l’expérience de Conventions Citoyennes avec des participant.e.s tiré.e.s au sort, et davantage de pays qui les ont incorporées au niveau local ou régional. Cependant, l’Europe est sur le plan culturel et linguistique très diverse, mettre en place une « Europe miniature » nécessite plus de réflexion et de préparation au niveau transnational.
Les Conventions Citoyennes européennes, appelées panels de citoyen.ne.s européen.ne.s, formeront l’Europe miniature qui débattra sur l’avenir de l’Europe. Les panels de citoyen.ne.s échangeront sur des sujets qui ont déjà été déterminés par les Institutions européennes, prenant en compte les priorités politiques des Institutions, leur agenda stratégique et les défis amenés par la pandémie de la Covid-19. Les 9 catégories sont : 1. Changement climatique et environnement, 2. santé, 3. une économie plus forte, justice sociale et emploi, 4. l’Union européenne dans le monde, 5. valeurs et droits, Etat de droit, sécurité, 6. transformation numérique, 7. démocratie européenne, 8. migration, 9. éducation, culture, jeunesse et sport. Une catégorie à part sera réservée aux « autres idées ».
Les panels de citoyen.ne.s seront représentatifs de la diversité sociologique de l’Europe et seront composés selon des critères d’origine géographique, de genre, d’âge, de classe économique et sociale et/ou de niveau d’éducation. Un tiers de chaque panel de citoyen.ne.s sera réservé aux jeunes âgé.e.s entre 16 et 25 ans afin de renforcer la dimension jeune de l’Europe.
Il y aura 4 panels de citoyen.ne.s au niveau européen, chacun composé de 200 citoyen.ne.s tiré.e.s au sort parmi tous les Etats membres. Les Etats membres seront représentés selon une proportionnalité dégressive, sur le modèle de la composition du Parlement européen, où les Etats moins peuplés sont proportionnellement plus représentés.
Les panels de citoyen.ne.s se réuniront au cours de 5 sessions délibératives : 1 session d’ouverture, 3 session de travail et 1 session de clôture. Les 3 sessions de travail dureront 2 jours et demi, et 1 session sera en ligne. Chaque panel sera dédié aux catégories et sujets spécifiques, elles se réuniront dans différentes villes européennes.
En plus des catégories déjà déterminées, les panels de citoyen.ne.s seront alimentés par les idées issues de la plateforme numérique de la Conférence, qui a été inaugurée le 19 avril. Sur la plateforme en ligne, tous les individus sont invités à soumettre leurs idées et suggestions sur l’avenir de l’Europe, les utilisateurs peuvent soutenir des propositions et des commentaires déjà existants. Cependant, la question des suggestions et propositions qui seront présentés devant les panels de citoyen.ne.s et la manière de les choisir reste encore à déterminer.
Les citoyen.ne.s prendront aussi part à la Conférence plénière composée de 433 membres, laquelle recevra les recommandations délibérées par les panels de citoyen.ne.s et rédigera les résultats. Un total de 108 citoyen.ne.s se joindra à l’assemblée plénière. La répartition exacte : 80 citoyen.ne.s des panels de citoyen.ne.s, 27 citoyen.ne.s (1 par Etat membre) des Conventions Citoyennes ou évènements nationaux, et 1 citoyen.ne du Parlement Européen des Jeunes. Le reste des membres pléniers viennent du Parlement européen, des Parlements nationaux, du Conseil, de la Commission, du Comité économique et social européen, du Comité des régions et des partenaires sociaux et de la société civile.
Enfin, toujours dans la lignée des complexités de la conférence, l’assemblée plénière rédige de manière consensuelle les résultats des panels de citoyen.ne.s après en avoir débattu et les soumet au Conseil exécutif. Un rapport est produit par le Conseil exécutif, sur une base aussi consensuelle, et est publié sur la plateforme en ligne. Enfin, au printemps 2022, le rapport est présenté aux représentants du Parlement européen, du Conseil et de la Commission - qui forment la présidence conjointe de la Conférence -, lesquels décideront chacun comment ils y feront suite dans la limite de leur sphère de compétences respective et conformément aux traités.
Bien que la Conférence ne doive être clôturer qu’au printemps 2022, Democracy international considère que cette Conférence est le coup d’envoi d’un processus sur plusieurs années de réformes et de révisions démocratiques de l’Europe. La Conférence devrait utiliser avec les citoyen.ne.s cette opportunité unique pour étudier l’étendue des réformes démocratiques qui peuvent être mises en place sous la version actuelle des traités, et au besoin, proposer de potentielles révisions aux traités. Si la Conférence recommande que les traités soient modifiés dans son rapport final, les Institutions européennes devront créer une Convention officielle, en vertu de l’article 48 du Traité de Lisbonne, qui sera démocratique, transparente et inclusive, sur le modèle de nos exigences pour la Conférence. Une dernière ét ape serait un référendum à l’échelle européenne sur les résultats de la Convention de l’UE.
La Conférence a commencé officiellement par une cérémonie le 9 mai, Journée de l’Europe, et a été diffusée en direct. Avec le début de la Conférence, il est important que les citoyen.ne.s restent au centre de cet exercice, et nous espérons qu’un nouveau chapitre de l’histoire de la démocratie européenne s’ouvrira avec sa première réunion en automne 2021.
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